Guerison des memoires



Les blessures infligées aux générations passées et présentes à travers le monde ne peuvent être négligées. Elles laissent des cicatrices et restent souvent non guéries, perpétuant le conflit. Selon les échanges de la conférence du Caux Forum, plus que jamais, la guérison est nécessaire pour briser les cycles de violence et instaurer un changement mondial.

Les progrès vers la sécurité humaine sont souvent limités par des attitudes et des relations établies qui manquent de dialogue et de confiance. « La guérison de la mémoire est cruciale pour la sécurité humaine », comme fait savoir Jonathan Rudy, conseiller principal d’Alliance for Peacebuilding. « Transformer les ennemis en amis grâce à l’amour et au pardon est un processus long et difficile pour lequel nous avons besoin de la communauté, nous avons besoin les uns des autres. C’est un travail essentiel pour rétablir toutes nos relations. » L’histoire et l’expérience de chaque personne, leur besoin d’être reconnu et entendu et leur reconnexion à ce qui a été déconnecté sont au cœur de la guérison des mémoires.

Ainsi, dans le contexte de la région des Grands Lacs où de plus en plus d’évènements sombres ont affectés l’intimité des peuples et des individus, l’amorçage d’un processus de guérison devient un besoin de premier plan pour une paix durable. Et cela suite à cette flambée de violences qui a touchée non seulement l’architecture anthropologique des peuples, mais plus la dimension subtile d’être des individus, c’est-à-dire leur psychologie et leur mental, et dont les effets demeurent insoupçonnés sur la qualité des liens sociaux qui se tissent dans cette région.

Dans une séance de recherche sur les traumatismes liés aux vagues des tensions qu’ont connues les communautés de la région, le jeune Serge du Nord-Kivu en République Démocratique du Congo, venu de Beni et vivant à Goma soulignait ce que sont devenues les communautés de la région, il disait : « quand je revis mon passé, c’est ces images de ma terre natale incendiée, où je suis finalement devenu étranger sans ma volonté par le fait que je n’ai plus la possibilité d’y revenir étant donné la violence, l’incertitude et la mort qui y soufflent encore qui me reviennent en tête. Quand je regarde qui je suis devenu, un jeune homme errant sans perspective, en mal de retrouver sens à sa vie dans cette ville qui ne m’offre pas de possibilités d’épanouissement, je repense à cet état où je pouvais cultiver mon champs, avoir des moments chaleureux avec ma famille et jouir de la vie, mais tout n’est plus… » Et renchérit : « Les images des morts stationnent dans ma conscience telles des effigies éternelles des héros, et cela me hante nuit et jour, parfois j’essaye d’inventer des plaisirs artificiels pensant s’en débarrasser, mais vite ces visages des disparus, ces cris d’enfants, de mes jeunes frères maintenant dans l’au-delà, reviennent comme des monstres souterrains cherchant inlassablement des voies pour remonter à la surface de la conscience et de la vie pour la hanter… » Dans une telle disposition où tout s’est effondré, où l’on vit dans l’enchainement et l’anéantissement progressive de soi suite à la rumination d’un passé chargé des meurtrissures, la définition des voies de sortie prend une autre dimension de sens, tant pour déclencher ce processus de redevenir homme jouissant de la plénitude de son humanité, libéré des fardeaux, et faisant émerger les fleurons d’une vie nouvelle dans la bouse des malheurs traversés, de telle sorte à faire de la charge d’horreur du passé une possibilité d’un engagement social rédempteur qui fertilise d’autres vies en leur mettant sur le chemin de la pleine libération. Ce programme se charge d’accompagner psychologiquement les victimes des atrocités dans ce processus de guérison pour retravailler leur paix intérieure et contribuer à une paix sociale durable en République Démocratique du Congo spécifiquement.









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